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Umberto Eco ist tot ˗ die Auseinandersetzung mit ihm nationale Pflicht in Deutschland Beitrag

Michael Nerlich

Romanistische Zeitschrift für Literaturgeschichte, Jahrgang 41 (2017), Ausgabe 3-4, Seite 467 - 503

Un des événements culturels les plus étranges dans l`Allemagne de l`après-guerre est la réception négative que la critique littéraire dans les médias, appelée «Feuilleton», a réservée à l`œuvre (romanesque) d`Umberto Eco. Elle est d`autant plus étonnante qu`aucun autre auteur (étranger) n`a jamais intégré aussi exhaustivement l`histoire allemande (aussi bien dans son travail scientifique que) dans sa production romancière et que de pareils jugements ne se trouvent dans aucun autre pays. Au contraire, les romans d`Eco ont été accueillis partout ailleurs avec respect, voire admiration ... pour ne pas parler du public dont la fascination se manifeste dans des tirages chiffrant en millions d`exemplaires, ce qui a incité le „Feuilleton“ à déclarer que ce public est trop bête pour se rendre compte de la mauvaise qualité des romans d`Eco. Pour donner une petite idée de cette avalanche de diatribes: les romans d`Eco sont „surchargés de savoir complètement superflu“ et partant „douloureux comme la torture de l`Inquisition“, „fabriqués pour des étudiants de première année“, mais aussi les „facultés de littérature entre New-Haven, Paris, Constance et Bologne“. Or bien que le „Feuilleton“ déclare que ces romans du „professore“ sont „fabriqués avec l`aide d`un ordinateur“, et qu`ils ne sont pas ˗ catégorie esthétique absolument décisive pour le „Feuilleton“ ˗ „sortis des tripes“, il n`hésite pas à constater qu`ils sont „de la purée non digérée de l`intestin“, voire (textuellement) „de la merde“. Comme ce flot de jugements haineux en totale opposition à la fascination exercée par les romans d`Eco sur des millions de „simples“ lecteurs allemands, l`auteur de la présente étude a essayé de trouver les raisons socio-culturelles à ce phénomène pour que le „Feuileton“ puisse enfin entrer dans un dialogue rationel avec ‚La Repubblica‘ du 20.02.16) „uno dei [...] più importanti uomini di cultura europea“ dont toute l`œuvre tourne autour de l`Allemagne et qui ˗ contrairement aux „feuilletonistes“ ouest-allemands ˗ avait soumis son passé politique et culturel à la critique indispensable après la catastrophe mondiale causée par le déraillement de sa propre nation, l`Italie fasciste, alliée de l`Allemagne nazie. Or le grand déraillement de la critique littéraire allemande commence en 1808 avec les ‚Discours à la nation allemande‘ de Fichte qui ˗ mû par la haine contre la France ˗ proclame la mort de la littérature française car rédigée dans une langue stérile sans ancrage dans le sol d`une France autrefois germanique, le néo-latin dit français, inapte à la création car séparée de ses origines ethniques, tandis que l`allemand, toujours vivant dans et avec le peuple germanique, son sol et son sang, serait et resterait éternellement productif-inventif. Ces idées fichtéennes se propagent dans toute la vie intellectuelle allemande, donnant des impulsions aux théories herméneutiques des Schleiermacher et Dilthey avec leurs thèses de l`impossibilité d`une appréciation des créations littéraires au seul niveau intellectuel et de la nécessité de saisir leur sens profond par une approche „congénialement“ intuitive. Les guerres franco-allemandes aidant, ces thèses pénètrent aussi dans les sciences humaines avec en particulier celle des langues et littératures romanes, se propageant en mˆme temps dans tous les discours politiques, atteignant l`apogée dans les doctrines esthétiques nationales-socialistes d`un Rosenberg, situant la création artistique dans le „Blut und Boden“ d`un mystique „Hellas“ nordique-germanique, et pro-fascistes d`un Ernst Robert Curtius, disant adieu à la culture „intellectualiste“ française, situant ˗ en s`alignant sur les travaux racistes du „génial“ Josef Nadler ˗ le renouveau d`une véritable culture allemande dans la ranimation d`une Rome germanique et appelant à la collaboration avec l`Italie de Mussolini. Or tandis qu`après 1945, les thèses de Rosenberg disparurent des universités et des médias, les thèses de Curtius, purgées de ses saillies pro-fascistes et antisémites, réunies dans son ‚Littérature européenne et moyen-åge latin‘ ˗ ouvrage dépourvu de toute véritable connaissance historique selon Eco - devinrent une espèce de bible pour les sciences humaines dans l`Allemagne de l`Ouest où l`exégèse „congéniale“, purgée à son tour de ses implications racistes et anti-françaises, continuait de triompher dans les universités, hostiles aux recherches sociologiques et surtout marxistes dans le contexte de la guerre idéologique contre l`Allemagne de l`Est. L`étude ci-dessus tente d`esquisser les méandres de ces combats idéologiques et ses conséquences pour la (non-)réception de l`œuvre d`Eco qui, lui, dans l`Italie libérée du fascisme, a réalisé ce bilan critique du passé italo-allemand, en tenant compte, justement, des aberrations herméneutiques de la „congénialité“, représentées entre autres par son directeur de thèse Luigi Pareyson, de quoi est issue non seulement son immense œuvre scientifique, mais aussi romanesque, conspuée par la critique littéraire du „feuilleton“ allemand toujours adonné aux idées de la „congénialité“ et de la création „aus dem Bauch heraus“ qui lui ont été inculquées par une „Geisteswissenschaft“ à la Curtius. Pour contribuer à mettre un terme à la domination de cette „Geisteswissenschaft“ dans les médias allemands et à pouvoir enfin profiter de l`œuvre d`Eco dans toute son importance, l`auteur suggère la création d`un centre italo-allemand pour l`étude des rapports Umberto Eco ˗ Allemagne, importants pour toute l`Europe, voire le monde entier.

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